Romans

La Duchesse de Singapour, ed. Pierre-Guillaume de Roux
Éditions Pierre-Guillaume de Roux,
avril 2011

La Duchesse de Singapour est un roman de maturité. Après Alice la saucisse, un livre sur une enfance tourmentée, bouffonesque et castratrice, Caroline assassine, une histoire dans laquelle l’adolescence se révolte et triomphe, Clitomotrice, clin d’œil provocateur aux féminités exacerbées et aux contes de fées qui finissent bien, après L’Homme de la Mer Noire, qui noie le miel dans le sang, vient le temps de la maturité…

De la plénitude, de l’insouciance retrouvée, de l’amour aussi. Un amour aux senteurs de jasmin et de fleur d’oranger. Une étrange amitié entre deux femmes, qui perdues à Singapour dans une société d’expatriés étriquée et médiocre, s’enfoncent dans une moiteur équatoriale qui tour à tour les étouffe et réveille leurs sens.

Les âmes se diluent, les corps se retrouvent et s’unissent. Quelquefois de manière brutale. Le plaisir se fait intense, à la limite de l’insoutenable.

Vanité, tout est vanité. Sur les traces des personnages de Flaubert, ceux de la La Duchesse de Singapour, tentent de vivre leur plaisir jusqu'à l'ultime. Sans y parvenir.

Comprendre le monde par la méditation. Se fondre dans l’être en restant à son extrême surface. Comme par enchantement.

Ré enchanter le monde. Dans un va et vient entre corps et esprit. Pénétrer ce qui est impénétrable, à la recherche du sens de l’interstice, de l’entre deux, de ce qui échappe et pourtant nous remplit.

« L’illusion est sentimentale. Je la crois rosacée ».

Sophie Jabès, 8 février 2011

Extrait :

Je ne suis pas retournée à Singapour et n’y retournerai probablement jamais. Je ne veux pas revoir les bougainvillées et les frangipaniers, je ne veux plus sentir l’odeur âcre des fleurs blanches, sur le chemin, quand je courais le long de Cluny Road. Je ne veux plus d’un corps gonflé d’humidité et d’une tête embuée d’une chaleur chaque matin toujours plus tenace et plus forte.

Je ne veux pas retracer les lieux qui me rappelleraient, un à un, le déroulement du drame auquel j’ai assisté impuissante.

Je veux oublier le Botanic Garden : les lotus blancs et mauves qui s’ouvrent et se referment sur le lac, la musique de la mosaïque d’orchidées jaunes et orangées, les oiseaux de paradis et les groupes d’Indiens qui vident les étangs pieds nus au petit matin.

Je veux oublier les bouquets qui trônent dans le hall de l’hôtel Shangri La. Je veux oublier les bosquets de lauriers roses au carrefour de Paterson Road et de Grange Road, et le goût du fried rice avalé dans le hawker de Pau La Sat dans la moiteur équatoriale. Je veux oublier la vue sur la mer du haut du Tower Club et les gouttes de sueur quand je marchais seule près de White House Road.

J’aimerais ne plus entendre les cacatoès dans les palmiers et les sonneries incessantes des pagers et des téléphones portables. J’aimerais oublier la frénésie d’Orchard Road et la langueur des maisons coloniales...

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